Entretien d'Aline Peltier. 28 ans, volcanologue à l'Institut de physique du Globe de Paris.

 

Combien y a-t-il de volcans sur la planète ?

Environ 1 500 actifs, c'est-à-dire dont la dernière éruption date de moins de 10 000 ans. Si l'on compte les volcans éteints, il y en a plusieurs dizaines de milliers. Plus des centaines de milliers de volcans sous-marins.

A-t-on déjà observé un cas comme celui d'Eyjafjöll ?

En Islande, c'est un phénomène fréquent car il y a régulièrement interaction entre les magmas et la glace qui est en surface. Le choc de la rencontre entre le magma (à plus de 1 000°C) et la glace rend l'éruption plus explosive. La lave se fragmente en fines particules qui sont projetées sous forme de panache. Sa dispersion dépend ensuite de la direction des vents. En 2000, l'Hekla avait généré un tel panache de cendre, mais cela n'avait duré que deux jours. Pour trouver des cas qui ont duré aussi longtemps, il faut remonter au XIX^e siècle.

Comment est estimée la dangerosité d'un volcan ?

Tout d'abord par son type : explosif ou effusif. Plus les magmas sont visqueux car riches en silice et plus l'éruption sera explosive et donc dangereuse. Ensuite, on parle de risque quand des populations peuvent être affectées par une éruption potentielle.

Quelles sont les zones dangereuses ?

Les zones de subduction, c'est-à-dire là où une plaque océanique passe en dessous d'une autre plaque, océanique ou terrestre. L'eau ou d'autres fluides entraînés par la plaque rend l'éruption plus explosive. C'est le cas de l'arc des Antilles, du Japon, et de la Cordillère des Andes, par exemple.

Qu'est-ce qui permet de prévoir les éruptions ?

L'augmentation de secousses sismiques et les déformations de surface. Ces deux signaux sont surveillés par des capteurs. On peut aussi voir les déformations de surface à partir d'images satellites. Pour les volcans qui émettent des fumerolles, on observe un changement de leur composition.

Combien de temps à l'avance est-il possible de prévoir une éruption ?

Tout dépend des volcans. Pour Eyjafjöll, on a eu les premiers signes précurseurs un an avant, mais on ne savait pas exactement quand il allait se réveiller. Au piton de la Fournaise, on peut prévoir une éruption jusqu'à cinq mois à l'avance. Dans certains pays, où il y a beaucoup de volcans, il n'est pas possible de les surveiller tous : il arrive qu'un volcan surprenne tout le monde. Par exemple, le Chaitén (Chili), en mai 2008 : il n'y avait pas de capteurs, on le croyait endormi car il n'y avait pas eu d'éruption depuis plus de 9 000 ans.

Quels sont les volcans les plus surveillés ?

Il y en a beaucoup, notamment à Hawaï (États-Unis), mais aussi en Italie. En France, les trois volcans des DOM sont surveillés étroitement par l'Institut de physique du Globe de Paris.

Ce sont les plus dangereux ?

Pas forcément. Le piton de la Fournaise n'est pas très dangereux puisqu'il y a peu d'habitants menacés et que leur activité est effusive. Mais c'est un volcan « laboratoire », très souvent en éruption. Certains volcans du Japon, le Vésuve qui surplombe Naples ou le Popocatépelt qui menace Mexico sont très suivis car beaucoup plus dangereux. Et beaucoup de volcans en Afrique, dangereux, ne sont pas ou peu observés, faute de moyens financiers.

Observe-t-on aussi les volcans endormis ?

Oui. La Soufrière de Guadeloupe ou la montagne Pelée, en Martinique, endormis depuis 1976 et 1932, sont aussi surveillés.

Quel est le plus dangereux : un volcan endormi qui entre brutalement en éruption ou un volcan dont l'éruption est continue ?

Tout dépend du volcan, s'il est effusif ou explosif. Certains, en éruption continuelle, peuvent montrer des paroxysmes ponctuels. Pour un même type de volcan, les endormis sont les plus dangereux car on les connaît moins bien, les populations habitant aux alentours ne sauraient pas comment gérer la crise. Alors que ceux qui habitent à proximité d'un volcan en activité permanente, comme sur l'île de Tanna, au Vanuatu, sont habitués. Ils savent vivre avec leur volcan.